Une épidémie transfrontalière d'une variété atypique de tuberculose est détectée chez des sangliers

1 octobre 2020
  • C'est une variété causée par une bactérie qui affecte principalement les rongeurs sauvages. La même souche de la maladie a été retrouvée chez des sangliers dans les Pyrénées catalanes et dans le sud de la France, ce qui montre que la maladie a peut-être traversé la frontière pyrénéenne.

La tuberculose animale est une maladie endémique en Espagne, mais elle peut aussi être une maladie importée d'autres régions. Récemment, grâce à une collaboration entre l'IRTA-CReSA, le Département de l'Agriculture, de l'Élevage, de la Pêche et de l'Alimentation (DARP) du gouvernement de Catalogne et l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), nous avons détecté une épidémie atypique de tuberculose animale chez les sangliers qui toucherait les deux côtés de la frontière entre la Catalogne et le sud de la France.

Plus précisément, plusieurs cas de tuberculose ont été détectés chez des sangliers de la vallée d'Aran et au nord du Pallars Sobirà. Dans tous, l'infection a été causée par la bactérie Mycobacterium microti, une bactérie qui jusqu'à présent avait été détectée principalement des rongeurs sauvages. Par ailleurs, les résultats de l'étude, publiés dans la revue Emerging infectious diseases, confirment que la souche pathogène retrouvée chez ces sangliers pyrénéens est la même que celle du sud de la France, plus précisément dans la région Ariège et Haute-Garonne, juste de l'autre côté de la frontière. C'est une souche qui affecte également d'autres espèces telles que les blaireaux, les chats, les chiens et les lamas.

Une épidémie atypique, mais pas rare

Les sangliers infectés présentaient des lésions granulomateuses nécrosantes, principalement dans les ganglions lymphatiques mandibulaires. Ce sont des lésions très caractéristiques de la tuberculose mais il est généralement difficile de distinguer ces lésions de celles provoquées par d'autres bactéries plus courantes telles que M. bovis ou M. caprae. Les analyses ont confirmé qu'elles étaient causées par la bactérie M. microti.

Quel rôle le reste de la faune sauvage joué dans la propagation de la maladie?

C'est un cas très curieux, car jusqu'à présent, il avait été décrit que M. microti est un pathogène qui infectait principalement des rongeurs sauvages tels que la taupe rouge (Myodes glareolus), la taupe de montagne (Microtus agrestis) et la souris forestière (Apodemus sylvaticus). Il a également été documenté qu'il peut infecter d'autres espèces, telles que certains ongulés ou carnivores, mais on ne sait pas si l'infection persiste dans sa population. On ne sait pas non plus comment il peut affecter le bétail domestique dans les troupeaux de vaches, de chèvres ou de moutons qui peuvent être exposés à cette bactérie.

En fait, M. microti est une bactérie très proche de M. bovis et M. caprae, qui sont les principales causes de tuberculose chez les ruminants. Récemment, il a été proposé que toutes ces espèces bactériennes soient considérées comme des variants d'une seule espèce (M. tuberculosis), car elles partagent plus de 99,9% des séquences nucléotidiques de leur génome. Cela suggère que les ruminants domestiques peuvent également être infectés par cette bactérie ou, à tout le moins, s'ils y sont exposés, peuvent donner des résultats positifs aux tests de diagnostic. Ce fait est pertinent si l'on considère qu'il s'agit d'espèces soumises à des programmes d'éradication et de contrôle de la tuberculose.

Cette découverte ouvre la porte à de nouvelles pistes de recherche pour savoir si les rongeurs sauvages jouent un rôle dans l'épidémiologie de la tuberculose, quel est l'impact de M. microti sur les animaux domestiques et sauvages, et quelles sont les mesures de biosécurité à considérer. Le travail est en cours!

Article scientifique:

Mycobacterium microti Infection in Free-Ranging Wild Boar, Spain, 2017–2019, Bernat Pérez de Val, Albert Sanz, Mercè Soler, Alberto Allepuz, Lorraine Michelet, María Laura Boschiroli, and Enric Vidal, Emerg Infect Dis. 2019 Nov;25(11):2152-2154.

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